Symptômes

  • Diarrhée chronique, intermittente, puis incoercible,
  • Appétit conservé
  • Poil piqué et terne
  • Absence de fièvre
  • Amaigrissement extrême et rapide, malgré la conservation de l’appétit
  • Mort

Mesures sanitaires

  • Protection du veau
  • Hygiène du vêlage
  • Séparation mère-veau après la naissance (pas de tétée)
  • Hygiène de la nurserie
  • Pas d’épandage sur les parcelles des jeunes
  • Des vaches en bonne santé 
  • Equilibre alimentaire
  • Maîtrise du parasitisme

La Paratuberculose, une maladie complexe…

La Paratuberculose ou entérite paratuberculeuse est une maladie digestive infectieuse et incurable qui affecte les ruminants adultes domestiques ou sauvages. Elle est due à une Mycobactérie (Mycobacterium avium paratuberculosis – MAP), proche de celle de la tuberculose ou de la lèpre. Cette bactérie est extrêmement résistante dans le milieu extérieur. Elle peut ainsi survivre près d’un an dans les déjections. Des récentes études montrent même la persistance du germe dans la microfaune, telles que les amibes présents dans des abreuvoirs.

Cette maladie est très contagieuse. La contamination se fait par voie orale. Les veaux s’infectent directement au contact des bouses de bovins adultes excréteurs ou via des éléments souillés par les matières fécales (mamelle, alimentation, abreuvement, sols, murs, tubulaires). La bactérie peut être également transmise par la vache au veau par le colostrum, le lait ou par voie transplacentaire. Aussi, les femelles issues de mères infectées doivent-elles être réservées à l’engraissement ou inséminées en croisement industriel. Exceptionnellement, des veaux peuvent être contagieux entre eux.

Les jeunes bovins présentent une réceptivité maximale à l’infection pendant les 30 premiers jours de vie. Cette réceptivité diminue ensuite mais les risques demeurent jusqu’à 6 mois, rarement davantage.

Les symptômes cliniques apparaissent sur des animaux âgés de plus 2 ans, souvent à la suite d’un stress, en relation avec les conditions d’élevage : vêlage, tarissement, transitions alimentaires, carences nutritionnelles, parasitisme, production laitière…..

Cette longue incubation rend difficile le diagnostic et la mise en place de moyens de lutte.

En l’absence de traitement et de vaccin réellement efficace, la lutte menée par les GDS repose sur la mise en place de mesures techniques de protection des veaux dans les élevages infectés associés à des dépistages sérologiques réguliers sur les animaux âgés de plus de 2 ans. Cette lutte demande constance et rigueur dans les mesures sanitaires pour atteindre la maîtrise de l’infection.


La Paratuberculose, une maladie sournoise…

Sa lente évolution vers la phase clinique et la dissimulation de la bactérie dans l’organisme pénalisent la sensibilité des tests de dépistage (présence de faux négatifs) et rendent nécessaire la répétition des analyses pendant plusieurs années pour parvenir à détecter les animaux infectés.

La Paratuberculose est ainsi surnommée maladie de type « Iceberg’’. L’infection est beaucoup plus fréquente que la maladie. Un élevage bien suivi sur le plan hygiène, nutritionnel et parasitaire, occasionne peu de stress sur les animaux. L’infection est présente mais se dissimule à l’insu des éleveurs en ne s’exprimant pas cliniquement.

On distingue ainsi 4 catégories d’animaux qui cohabitent dans le troupeau :

  • Les animaux malades représentent la partie visible de l’infection.
  • Les excréteurs permanents, sans symptômes mais très contagieux (plusieurs milliards de bactéries/g de bouse). Ils sont  facilement dépistables. Ils sont peu nombreux mais représentent un risque majeur pour le troupeau
  • Les intermittents de l’excrétion, détectables au moment où la bactérie se trouvent dans les bouses ou qu’elle a traversé la muqueuse intestinale et a induit la fabrication d’anticorps détectables dans la circulation sanguine. Ces animaux sont plus fréquents.
  • Les animaux qui excrètent peu ou pas encore. La bactérie est neutralisée dans l’intestin. Elle n’est ni dans les bouses, ni dans le sang. Ces animaux sont difficilement détectables. Ils sont très nombreux et constituent le réservoir de l’infection.

Malgré ces difficultés, les plans de lutte donnent de bons résultats, mais ils réclament patience et persévérance. Si les dépistages successifs permettent d’éliminer rapidement l’apparition des cas cliniques et abaissent progressivement la pression d’infection, la maîtrise de la circulation du germe dans l’élevage n’en reste pas moins une course d’endurance. Ceci peut demander 5 ans en élevage laitier. En élevage allaitant, le contact du veau avec les mères est un facteur aggravant. La contamination est beaucoup plus difficilement maîtrisable et les efforts peuvent se prolonger durant 10 ans.

Il existe une grande variabilité entre les élevages. Un assainissement complet (¹ éradication) se produit dans 25 à 50% des cas. Le succès de l’assainissement est très lié à l’investissement de l’éleveur dans la démarche et au respect des mesures sanitaires préconisées.

L’objectif prioritaire des GDS a toujours été la maîtrise de la maladie clinique dans les élevages infectés. Les plans de lutte sont efficaces dans les élevages concernés mais ont un impact limité sur le contrôle de l’infection à l’échelle régionale et nationale. La Paratuberculose est trop largement répandue dans les élevages. Dans les élevages laitiers du Grand Ouest, il est admis que l’infection touche 50 à 70% des cheptels (73% en Mayenne), dont 10 à 20% très durement. Or, elle se transmet par l’achat de bovin. Les contrôles à l’introduction manquent de fiabilité. Grâce à ses capacités de dissimulation, rien n’empêche l’infection de se diffuser au sein des élevages. Elle y entre par l’introduction de bovin(s) infecté(s), asymptomatique(s) qui va excréter des germes insidieusement dans les locaux, les pâtures. L’infection s’installe, progressivement, à bas bruit, se manifestant parfois plusieurs années plus tard. Dans l’intervalle, ce bovin a constitué une source d’infection dans le troupeau, a souillé l’environnement et a contaminé des jeunes veaux.


La Paratuberculose, une maladie coûteuse…

Il est donc essentiel d’élargir la stratégie de lutte contre la Paratuberculose car les enjeux sont importants. La Paratuberculose occasionne de lourdes pertes pour les éleveurs. Les pertes directes concernent les mortalités, les animaux sans valeur économique ou les réformes anticipées avec perte de valeur bouchère. Elles incluent également les frais d’analyses et actes vétérinaires. Les manques à gagner sont dues aux restrictions commerciales, aux pertes du potentiel génétique des bovins morts ou réformés prématurément, aux baisses de production lait/viande. Les pertes en lait ont été estimées de 2 à 6 kg/vache/jour, en fonction du stade d’évolution de la maladie. Même une vache saine dans un troupeau infectée se verra pénalisée dans sa production laitière (1.2 kg/j)…

Ainsi, le coût de la Paratuberculose est estimé entre 32 € et 95 €/vache/an. En 2016, le GDS Bretagne évaluait les pertes à 13 €/1 000 litres.

Le GDS de la Mayenne a mené une simulation économique en 2010 dans plusieurs élevages laitiers, révélant des pertes annuelles estimées entre 1 300 et 4 600 € (entre 32 € et 107 €/vache/an), en fonction de la prévalence de l’infection dans le troupeau, soit entre 5 et 22 €/1 000 litres.

L’impact économique en élevage allaitant est plus beaucoup difficile à évaluer. Il est toujours conséquent et se chiffre en milliers d’Euros. En 2018, une enquête du GDS de la Mayenne réalisée des élevages allaitants estimait les pertes en moyenne à 100 €/vache.

La Paratuberculose représente également un coût pour les gestionnaires que sont les GDS. Les plans d’assainissement mis en place dans les élevages infectés sont un investissement lourd en indemnisation des dépistages et aides financières aux réformes. Ainsi, en Mayenne, la Paratuberculose constitue le premier  budget pour un coût de 250 000€/an.


De nouveaux moyens de lutte

Depuis 25 ans, les GDS ont acquis une expertise en Paratuberculose. Afin de parfaire leur connaissance de la maladie et améliorer sa gestion collective, les GDS Grand Ouest mutualisent leurs moyens techniques, financiers et humains et investissent dans des programmes de recherche. Leurs travaux menés depuis 10 ans ont conduit à développer de nouveaux outils qui permettent aujourd’hui de gagner en efficacité et d’envisager à terme une nette amélioration du statut sanitaire des troupeaux.

Outil de décision à la réforme

Auparavant, les résultats d’analyses sérologiques étaient exprimés de manière qualitative : POSITIF/NEGATIF. A présent, ils s’expriment également quantitativement. En effet, les travaux du Grand Ouest ont montré que le test sérologique pouvait être corrélé à un niveau d’excrétion. Plus l’animal réagit fortement, plus il est considéré comme excréteur. En fonction du niveau de réaction, il est donc possible d’identifier les animaux les plus contagieux et de prioriser leur réforme. De ces études, est sortie la notion de « super excréteurs », des animaux asymptomatiques réagissant très fortement et sans doute plus contagieux qu’un individu malade. Ils sont responsables d’une grande partie de la contamination dans l’élevage et doivent être éliminés au plus vite, sans concession.

Les résultats sont interprétés par le GDS et expliqués à l’éleveur. Un calendrier de réforme est établi en fonction du statut physiologique de l’animal et de la capacité de réforme de l’éleveur.

Les indicateurs cheptels

Le dépistage individuel à l’introduction offrant peu de garantie, il était important de définir des statuts de troupeau afin de sécuriser les transactions commerciales en limitant les risques d’achat/vente de bovins infectés.

Les indicateurs cheptels, applicables à grande échelle, permettent d’évaluer avec fiabilité et pour un coût réduit le niveau d’infection des cheptels par la Paratuberculose.

En élevage laitier, depuis 2014, une sérologie annuelle sur lait de tank apparaît comme un marqueur permettant de suivre les cheptels indemnes et de détecter précocement des cheptels ayant de la Paratuberculose à l’état latent, avant que la maladie ne s’exprime par des signes cliniques.

En élevage allaitant, depuis 2015, le niveau d’infection est déterminé à partir de sérologies sur mélanges de 20 sérums réalisées lors de la prophylaxie.

La dynamique des résultats permet d’ »étiqueter » les élevages à risque, de leur proposer un protocole spécifique et de diffuser des messages de prévention aux élevages toujours négatifs.

Pour ces derniers, la combinaison de plusieurs tests permet de « garantir » un faible niveau d’infection. Les élevages négatifs dans le lait de tank ou sur les sangs de mélange se voient proposer des prélèvements de bouses dans les locaux, selon un protocole standardisé. L’ADN de la bactérie est recherché par la technique PCR. En couplant annuellement la sérologie et la PCR, il est ainsi possible de « qualifier » des cheptels à faible risque de diffusion de Paratuberculose  et de leur délivrer une attestation 1/1 000 (1 risque sur 1 000 de vendre de la Paratuberculose).

L’indicateur génomique

Prochainement, la maîtrise de la Paratuberculose va basculer dans une nouvelle dimension grâce aux travaux menés sur le génotypage.

Depuis longtemps, il était suspecté une influence génétique dans la résistance ou la sensibilité à l’infection par la Paratuberculose.

En 2013, au sein d’un consortium (figure n°1), les GDS du Grand Ouest et ses partenaires ont lancé une étude, baptisée Paradigm, afin de rechercher l’existence d’un lien éventuel entre génotype et infection chez les bovins laitiers de race Prim’Holstein et Normande.

Plusieurs milliers de bovins ont ainsi été collectés et génotypés. L’analyse des génotypes montre un déterminisme génétique assez fort de la Paratuberculose avec une différence marquée dans le patrimoine génétique entre les animaux infectés et les autres, notamment chez les Prim’Holstein. Les résultats sur les Normandes sont encore en cours de consolidation mais sont également prometteurs.

Un index génomique Paratuberculose a ainsi été calculé sur les Prim’Holstein et va être mis à la disposition des éleveurs dans les prochaines semaines.

Les plans d’assainissement des GDS vont donc connaître une profonde mutation en incorporant ce nouvel outil de gestion. La génomique va permettre de développer de nouvelles stratégies et d’améliorer fondamentalement les moyens de lutte contre la Paratuberculose en élevage laitier.

Dorénavant, nous pourrons caractériser de façon précoce les animaux en fonction de leur résistance ou leur sensibilité à l’infection. Afin d’accélérer l’assainissement et améliorer la résistance du troupeau, il sera alors conseillé, dans la mesure du possible, d’écarter de la reproduction ou d’inséminer en croisement industriel les génisses les plus sensibles.

L’information sur le statut du bovin est disponible dès la naissance et permet à l’éleveur d’orienter ses critères de sélection. Il peut faire le choix d’anticiper la réforme des génisses très sensibles. L’élimination des souches les plus sensibles sera déterminante dans le succès de l’assainissement car elles cumulent plusieurs handicaps. Selon les estimations, ces animaux représentent ¼ de l’effectif adulte d’un troupeau mais représentent la plus grande proportion de bovins positifs ou douteux. Ainsi, plus de 30% des animaux les plus sensibles (5% de l’effectif) seront non-négatifs aux dépistages sérologiques. A l’inverse, peu d’animaux de la catégorie résistante seront détectés (Schéma 1).

Estimation qualitative du niveau de résistance à la maladie

L’amélioration de la résistance des troupeaux viendra également des entreprises de génétique. Celles-ci ont entrepris un travail de sélection des taureaux présents dans les stations de testage. Des synergies vont naître entre les GDS et les inséminateurs pour gagner en efficacité. Il sera possible d’agir sur les plans d’accouplement et de choisir des taureaux « améliorateurs » pour apporter de la génétique « résistantes » aux lignées sensibles.

Surtout, la génomique devient un outil supplémentaire dans la lutte contre la Paratuberculose. En fonction du profil génétique, la dynamique des dépistages pourra être adaptée. Le protocole pourra être allégé pour les animaux résistants avec, par exemple, un dépistage tous les 2 ans. En revanche, le rythme des dépistages sera renforcé sur les animaux sensibles. Si l’éleveur fait le choix de les conserver, au regard de leur haute valeur génétique, ces bovins devront subir un dépistage plus précoce (12 mois) et répété plus régulièrement (tous les 6 mois). Cette surveillance renforcée permet de détecter précocement d’éventuels futurs excréteurs massifs et d’anticiper leur réforme avant qu’ils aient le temps de contaminer leur environnement.

Ce plan avec génomique offre plusieurs avantages.

Son efficacité est améliorée : La détection précoce et la réforme anticipée des animaux très sensibles permettent un gain de temps dans l’assainissement du troupeau.

Il limite les pertes économiques : Les analyses sont ciblées. Les génisses à risque de propager l’infection ne seront plus élevées. En abaissant ainsi la pression de contamination, les pertes de production et en génétique sont, à terme, réduites.

Néanmoins, cette révolution dans la gestion des plans de lutte ne doit pas occulter les fondamentaux. La Paratuberculose est une maladie de terrain, très liée aux conditions d’élevage. Aucune amélioration n’est possible sans l’application de règles de biosécurité élémentaires. La maîtrise (l’éradication ?) nécessitera toujours de la rigueur et de l’hygiène dans la conduite du troupeau.

Sensibles ou résistants, les veaux ne doivent jamais être exposés à des sources de bactéries. Les mesures sanitaires autour du vêlage et de l’élevage du nouveau-né restent déterminantes et gages de réussite. A l’âge adulte, la gestion des stress, la maîtrise du parasitisme et de l’équilibre alimentaire peuvent éviter l’apparition des symptômes. L’impact de l’alimentation sur les performances immunitaires, autrement dit, l’immuno-nutrition sera sans doute le prochain chantier à ouvrir.

L’éradication de la Paratuberculose n’est peut-être plus aussi illusoire. Les travaux des GDS du Grand Ouest ont permis d’améliorer la connaissance de la maladie et de développer de nouveaux outils de gestion.

La génomique sera une aide précieuse pour améliorer la résistance des troupeaux. Pour le moment seules les Prim’Holstein seront concernées. Les Normandes le seront bientôt. Ces travaux devront, à l’avenir, être déclinés pour identifier des marqueurs génétiques sur les autres races laitières et les allaitantes.

Depuis 25 ans, les GDS investissent dans la Paratuberculose. Leur savoir-faire, leur expertise sont reconnus de tous. Ces travaux ouvrent de nouveaux horizons et désignent plus que jamais les GDS comme des acteurs incontournables de la gestion de la maladie.